Thérèse et Isabelle

« J’ai su que j’avais été privée d’elle avant de la rencontrer »

Le roman Thérèse et Isabelle, écrit par Violette Leduc entre 1948 et 1951 et publié dans une forme restreinte en 1966 aux Editions Gallimard, traite la question de l’éveil amoureux. Un sujet topique, en somme, grand classique des romans d’apprentissage. Seulement, le texte sera par la suite censuré, dépouillé de son essence afin de convenir aux mœurs d’une époque et ne pas froisser ceux qui aurait pu l’être à la lecture de ce roman.

Thérèse et Isabelle sont deux jeunes femmes qui découvrent l’amour et le plaisir charnel dans le pensionnat d’un collège du Nord de la France. Durant trois nuits, Thérèse – la narratrice et double de Violette Leduc – s’initiera avec Isabelle au plaisir avant d’être découverte et séparée de son "amie" par les adultes. La mère de Thérèse occupe une place toute particulière dans cette séparation, elle représente une menace tout au long du récit. Les deux dernières phrases sont sans équivoques : "Ma mère me reprit. Je ne revis jamais Isabelle."

Thérèse et Isabelle est avant tout le récit d’un premier amour lesbien. Cette dimension érotique de leur amour fera reculer l’éditeur de Violette Leduc qui lui imposera de supprimer ce fragment qui devait, à l’origine, ouvrir son troisième roman, Ravages. Il ne paraîtra en version intégrale qu’en 2000, soit 46 ans plus tard et 38 ans après la mort de l’autrice. C’est d’amour dont il s’agit. L’amour fou et rien d’autre. Violette Leduc raconte une expérience qui n'a rien d'évident au milieu du XXème siècle. Ce premier amour est au coeur de la blessure de Violette Leduc, au cœur de sa littérature qui scrute sans concession les différents états de la condition féminine : luttes féministes, avortement, homosexualité, la fragilité psychique et la multiplicité des passions comme des désirs.